Road trip au Japon, des rizières aux métropoles

Découvrir le Japon, c’était le rêve de Corentin, depuis l’enfance il rêvait de voyager au Japon, l’univers des mangas importé en France grâce au Club Dorothée, les samouraïs, les films d’animation de Miyazaki et les jeux vidéo ont déclenchés en lui un engouement qui n’a jamais faibli. C’était une certitude, un jour, il irait au pays du soleil levant.

En ce qui me concerne, le Japon avec son identité culturelle et son style de vie marqué était une façon d’être autrement dépaysé. Lorsque j’habitais en Australie, j’ai remarqué que bien qu’au bout du monde, la société et le style de vie australien sont très occidentalisés. L’identité primaire de l’Australie est malheureusement peu visible. Je souhaitais pour mes futurs voyages être vraiment désorientée et découvrir une autre société. C’est ainsi que mon intérêt pour le Japon est né, sa réputation de pays fermé, sa forte personnalité, sa langue, son alphabet illisible et le fait que cette nation n’a jamais été envahi avec succès, tout cela a titillé mon envie de différence.

En tant que français, on peut rester 3 mois sur le territoire sans formalités, on a voulu en profiter au maximum, on est donc resté 3 mois, et ce ne fut pas de trop! À nous le Japon!


Au départ nous ne pensions pas intégrer le Japon dans notre tour du monde avec notre véhicule, ce n’était pas dans la direction. Les imprévus du voyage nous ont rapproché de l’archipel. L’occasion était alors immanquable, Corentin allait réaliser son rêve. De plus, c’est un pays où voyager coûte cher, mais on a réalisé qu’en tant que touriste la plus grosse dépense est le logement. Or en venant avec notre maison sur roues, le budget est sacrément allégé, on ne dort jamais en camping, seulement du bivouac, le confort du van nous convient très bien. Concernant l’alimentation, vu que l’on peut cuisiner dans le camion, là aussi les dépenses sont diminuées, ravitaillement dans les épiceries et marchés, repas fait maison et pas de restaurants, juste quelques folies gustatives auprès des stands de bouffe de rue, à prix très raisonnable. La question des coûts des transports se réglait d’elle-même vu qu’on apporte notre transport. Du coup. réflexion faite, voyager en van au Japon, c’est abordable !

Nous avons donc rejoint l’archipel nippon depuis la Corée du Sud, en empruntant un ferry au départ de Busan et en direction de Fukuoka sur l’île de Kyushu. La traversée a duré une nuit, et le confort des cabines fut une bonne introduction au minimalisme japonais. Dortoir sur une estrade, on laisse les chaussures à l’entrée, aucun mobilier autre qu’une étagère par passager, le lit consiste en un futon mince que l’on déroule au sol, une couverture et un bloc en cuir comme oreiller. Simple et suffisant.

Raconter 3 mois au Japon en détail, ce serait indigeste, c’est pourquoi on a choisi de relater ici ce qui nous a particulièrement plu dans les 3 provinces que l’on a traversées. Pour avoir tous les détails de notre itinéraire, ce lien vers Polarsteps vous indiquera toutes nos étapes avec les photos correspondantes.

Kyushu

Le débarquement à Fukuoka fut un peu long étant donné les procédures de mise en règle et d’inspection du véhicule. Nous savions que les japonais sont très respectueux du domicile, nous avons senti les douaniers gênés quand ils ont réalisé que notre véhicule est notre maison, l’inspection fut par conséquent peu poussée, on a eu le sentiment qu’ils culpabilisaient à l’idée de nous considérer peut-être en infraction, et rentrer dans le domicile d’un inconnu, c’est tout un rituel au Japon.

Une fois la paperasse réglée, à nous les nombreuses beautés de l’île de Kyushu.

Temples et sanctuaires

Avant de parler des lieux visités, bref aparté sur la religion au Japon. Il faut savoir que les japonais ont une vision neutre de la religion, ils mêlent facilement plusieurs courants religieux, et peuvent en pratiquer plusieurs. La religion principale, et la plus vieille, est le shintoïsme, qui regroupe un ensemble de croyances très anciennes, comprenant un panthéon large et de l’animisme. Cet ensemble de croyances mène à adorer des kami, sorte de divinités ou esprits habitants un lieu ou représentants les forces de la nature telles que le vent, les montagnes et les rivières. Ce culte confère un caractère divin à tout ce qui est ressenti comme puissant ou menaçant. La vénération des anciens est aussi très importante, beaucoup de japonais ont encore chez eux un autel en l’honneur de leurs ancêtres. Le shinto monte bien à lui seul le profond respect qu’ont les japonais envers les forces de la nature, selon eux les esprits et les divinités sont partout.

Au Vème et VIème s, les branches bouddhistes de Chine et de Corée font leur entrée au Japon, après des débuts froids, les deux religions vont pourtant fusionner par syncrétisme. En effet, le bouddhisme tire son épingle du jeu par rapport à l’idée que les kamis sont des esprits perdus, donc le bouddhisme apparaît comme une solution d’aide pour les problèmes karmiques. Les moines au moyen de rites et des lectures bouddhistes vont améliorer le karma du kami. C’est ainsi qu’au fil des siècles des temples bouddhistes vont être bâtis auprès des sanctuaires shintos pour guider les divinités et esprits des lieux vers le salut. Cette bonne intelligence qui crée une complémentarité entre deux religions à la base différente permet de satisfaire tout le monde. L’apparition des temples-sanctuaires « jingū-ji » va se répandre dans tout le pays. La fusion du bouddhisme et du shintoïsme durera jusqu'en 1868, date à laquelle le culte shinto est déclaré religion d’état. Le bouddhisme fut alors persécuté, les traces de cette religion, désormais réfutée furent nettoyées, certains lieux bouddhistes ont survécus en s’exilant dans des lieux reculés du Japon.

Dans cette confusion comment savoir si un lieu sacré est bouddhiste ou shinto ? L’architecture, les décorations et les symboles bien distincts permettent de différencier ces deux cultes.

  

Les éléments suivants sont liés au culte shinto, la présence d’un torii couleur vermillon qui marque l’entrée dans une enceinte sacrée, une corde faite en paille de riz (shimenawa) qui signale la présence d’un kami, des fidèles qui accrochent à l’entrée des planchettes en bois (ema) sur laquelle des prières sont inscrites (cela rappelle les ex-voto du culte romain), et des arbres ornés de "omikuji", cela consiste en des bandes de papier que l’on achète au hasard, comme un don pour le sanctuaire, ce papier dévoile un oracle de bonne ou mauvaise augure. Si l’oracle est positif, l'omikuji est à conserver. S'il est négatif, la bandelette doit être nouée sur un arbre du sanctuaire afin que les kamis conjurent la prédiction. On a essayé au sanctuaire shinto de Kushida-jinja à Fukuoka, et l’oracle n’était pas très clair, dans le doute on l’a attaché à une branche. ^^`

Partout dans le monde, on retrouve toujours dans les lieux bouddhistes des myriades de statues représentant des divinités, dans le culte shinto il n’y a pas à priori de représentations des kamis. Mais un des plus célèbres kamis, la divinité Inari, est parfois représentée sous forme d’un renard. Cet esprit vénéré fut complètement intégré dans le bouddhisme c’est peut-être pour cette raison que des statues lui ont tout de même été dédiées. En plus des statues, on retrouve des pagodes en pierres, des lanternes et des svastikas, à ne pas confondre avec la croix gammée !! Le svastika est un des plus vieux symboles de l’humanité, on le retrouve dans plusieurs civilisations du monde.  Ce symbole est omniprésent dans le bouddhisme, sa traduction voudrait dire « ce qui apporte la chance » et il représente la connaissance ésotérique et l’ensembles des enseignements.

Enfin ce qui distingue les lieux de cultes, c’est aussi leur utilisation, les japonais privilégieront les temples bouddhistes pour cérémonies liées aux décès ou pour leur chemin personnel vers l’Éveil.  Les sanctuaires shintos sont eux plutôt liées aux étapes de la vie, telles que les naissances et mariages ou pour prier pour la prospérité. On retrouve tout de même une influence catholique avec la présence d’églises qui permettent de célébrer des mariages « à l’occidentale ».

C’est un peu par hasard que nous entendons parler du temple bouddhiste de Nanzoin, situé aux alentours de Fukuoka. Ce lieu doit sa renommée à une immense statue de bouddha couché, elle mesure 41 mètres, et serait la plus grande du monde en bronze. Cette représentation du bouddha est à l’image que l’on s’en fait, tout en sérénité, on aime particulièrement sa patine vert-de-gris, avec le vert soutenu de la forêt derrière, cela fait un beau tableau.

  

Au-delà de l’attrait principal que représente la statue, le site abrite sur ses pentes plusieurs petits lieux de recueillements, mêlant autels, portiques sacrés dits torii, enfilade de statuettes et d’innombrables lanternes. La nature est omniprésente, comme partout au Japon, la végétation est luxuriante, il émane de cet endroit une belle atmosphère pour celui qui prend le temps de flâner dans les allées et de se perdre dans les méandres des escaliers.

Lors de notre tour de l’île de Kyushu, nous faisons halte dans la ville de Usa pour visiter ce qui serait le premier temple sanctuaire Usa Hachimangu-ji. Cette enceinte sacrée fut mixte, bouddhiste et shinto, jusqu'à la séparation des religions au XIXè siècle. Ce temple est aussi le premier et plus ancien sanctuaire dédié au dieu Hachiman, divinité de la guerre et des guerriers, il a été fondé au VIIIème siècle. Ce lieu est vraiment beau, au calme, verdoyant et très bien entretenu. Les sanctuaires shintos japonais sont épurés, pas de fioritures ici, la couleur vermillon en impose. C’est pour nous le plus beau temple shinto que nous ayons visité.  

  

Nature

Au travers de la mer, la pluie, les fleuves, les rizières et les sources naturelles, l’eau au Japon est omniprésente. Sur Kyushu, on trouve ce que l’on appelle les enfers de Beppu -Beppu no jigoku- ce sont des sources chaudes. Dans la ville au décompte « sept enfers » correspondant à sept sources différentes, l’appellation d’enfer vient du fait que ces bassins sont fumants et bouillants pour la plupart, pour certains la température avoisine les 100 degrés, il est hors de question de se baigner dans ses sources, mais y faire cuire des œufs, oui! On en trouve partout en vente pour les touristes.

Le ciel a décidé que ces lieux n’étaient pas assez humides et brumeux, c’est donc par une journée pluvieuse et sous le brouillard que nous visitons l’enfer de la mer -Umi Jigoku- et l’enfer du lac de sang -Chinoike Jigoku-.

Le premier est très surprenant, de couleur bleu cobalt avec un épais panache qui s‘en élève, on comprend le pourquoi du nom, c’est assez impressionnant! La couleur s’explique par une eau fortement concentrée en sulfate de fer. Aux abords, une grande serre abrite des magnifiques plantes tropicales et un peu plus loin un pédiluve permet de se réchauffer les pieds. On constate que l’utilisation des sources chaudes est profondément ancrée dans la culture japonaise, se déchausser et faire tremper ses petons avec des inconnus est une coutume naturelle.

 

Le second « enfer » est en revanche couleur rouge brique, fumant et bouillonnant par endroits, observer la surface de ce bouillon, c’est étrangement captivant. Toute cette activité rend la nature encore plus vivante et imposante. Ici, ce sont les oxydes de fer et l’ambre qui attribuent cette teinte ocre.

A proximité des bassins du fait de la chaleur et de l’humidité qui se dégage, la végétation est différente de celle que l’on trouve quelques mètres plus loin, cela donne des allures d’oasis tropical, en ville.  Ces deux sources sont apparues il y a plus de 1200 ans, elles le sont le résultat d’activité volcanique.  On imagine alors que de nombreuses légendes ont dû naître de ces lieux extraordinaires.

Le Japon sans les volcans ne ressemblerait en rien à ce qu’il est. Au centre de l’île de Kyushu, nous roulons dans l’une des plus grandes caldeiras du monde, au Mont Aso. La caldeira consiste en une zone de forme ronde au fond plat résultant de l’effondrement d’une chambre magmatique. Le Mont Aso comprend un complexe volcanique d’une quinzaine de cônes poussant dans la caldeira. il est toujours actif et de type éruptif, la ville d’Aso siège dans la plaine et le lieu est touristique, c’est pourquoi ce volcan est particulièrement surveillé. Le paysage est semblable à une sculpture faite de sillons et de mouvements de terrains, le sol très fertile nourrit une végétation verdoyante, contrastant avec la terre noire. Tout au long de la route, le jeu des couleurs et des formes mue le décor en un chef d’œuvre panoramique. Enclave paradoxale, ce calme si particulier au milieu d’un volcan, il y a tant de vie par ici, et tant de sérénité malgré le risque géologique majeur.

 

Au sud de l’île, nous admirons de loin le volcan de Kagoshima -Sakurajima- il fut longtemps une île au milieu d’une baie. Au début du siècle, une éruption avec des coulées de lave le transforma en une presqu'île. La ville de Kagoshima fait face au cratère, la mer les sépare, maintenant une distance de sécurité toute relative. Son activité est intense et dangereuse pour la population vivant toute proche. On a constaté que les japonais vivent dans un pays certes magnifique mais pas tendre, avec les tsunamis, les éruptions, les typhons, les glissements de terrains dus aux pluies et les tremblements de terres, il est alors pas étonnant de voir des hauts parleurs partout afin de prévenir les habitants du danger.

En sortant de la ville, nous avons retrouvé d’autres voyageurs, un couple des pays bas voyageant aussi avec leur camion, On s’est tous installés pour quelques jours au bord d’une belle grande plage, toilettes et douches sur place, baignade et feu de camp, de quoi nous sentir au paradis ! La police locale est passée tous les soirs pour vérifier note identité et nous rappeler que ce lieu est, selon eux, dangereux, une personne aurait été enlevée ici il y a des années. Durant nos 3 mois au Japon nous ne nous sommes jamais sentis en insécurité, c’est le pays où l’on s’est sentis le plus en sécurité.

De l’activité volcanique de l’île de Kyushu, il n’a pas résulté que des sources naturelles et des cratères mais aussi des canyons. Dans la préfecture de Miyazaki, nous nous sommes promenés le long des gorges de Gosake à Takachiho, les parois de part et d’autre de la rivière sont formées par d’ancienne coulées de lave, créant des orgues basaltiques, c’est ici une énième illustration de la force des activités terrestres. Un point de vue surplombant le canal, au-dessus de la partie calme du cours d’eau, permet de contempler la cascade de Manai fusant en contrebas et arrosant du haut de ses 17 mètres les visiteurs naviguant en barque.

Culture et traditions

L’Histoire et la culture japonaises déposent une empreinte visible partout, mais le Japon c’est aussi le contraste entre le contemporain et l’ancien. Dans la ville de Miyazaki, nous avons été attirés par le parc Heiwadai honorant ses deux époques.

Tout d’abord, l’époque moderne avec la tour de la paix, dont l’édification est commencée durant la seconde guerre, est faite de pierres venant de tous les coins d’Asie, symbolisant l’étendue de l’impérialisme nippon. L’inscription gravée « Hakko Ichiu » signifiant « unis sous un même toit », fait référence alors à cette emprise nippone. Mais la fin de la seconde guerre et la défaite de l’empire japonais font que cette tour finalisée en 1940 devient la tour de la paix, l’inscription atteste désormais une volonté de pacifisme mondial.

  

Un peu plus loin, des sentiers serpentent sous les arbres qui abritent d’étranges statuettes. Ces artefacts se révèlent être des haniwas, ce sont des représentations en terre cuites utilisées pour les rites funéraires. Ce jardin compte plus de 400 répliques d’haniwas retrouvées dans les tombes il y a plus de 1500 ans, et venant de toutes les régions du Japon. On déambule donc au milieu de figurines d’animaux, de samouraïs, maisons et bateaux qui symbolisaient souvent le statut du mort. Les haniwas figuratifs, à l’inverse des haniwas cylindriques déposés par les classes modestes, sont donnés par les membres de l’élite de la communauté du défunt. Ce rituel de fabrication de statuettes en terre cuites était aussi présent chez nous, notamment lors de la domination romaine.

La nature façonne les paysages mais elle façonne aussi les villages, la bourgade de Kurokawa doit son apparence aux eaux thermales, partout dans les ruelles on trouve des auberges traditionnelles japonaises proposant des bains chauds, on appelle ces lieux «ryokans». Les bâtisses sont superbes et l’ambiance toute particulière, tout ici invite au calme et à la détente. Le prix des prestations est pour nous hors budget, mais l’atmosphère des ruelles et des ponts enjambant le cours d’eau, animés par des passants en peignoirs, suffit à nous satisfaire de cette visite, même sous la pluie! Cela nous rappelle des scènes du film d’animation de Miyazaki, le voyage de Chihiro.

  

De l’autre côté de l'île, le château de Kumamoto domine la ville du même nom. C’est un site phare du Japon féodal, les fortifications datent du XVème siècle, son heure de gloire s’étale du XVIIème au XIXème siècle, il fut incendié et détruit en 1877 lors de la révolte des samouraïs contre le nouveau gouvernement de l’Empire du Japon. En effet, suite à des changements de société majeurs, les samouraïs ont perdu leurs privilèges liés à leur statut social, mettant en péril leur situation financière, en 9 mois la rébellion fut écrasée par les forces impériales, bien supérieure en nombre. Cette fronde marqua la fin de la classe samouraï, le leader Saigō Takamori est considéré comme le dernier samouraï, il meurt en se faisant hara kiri sur le champ de bataille. Il fut élevé au rang de héros par le peuple, le gouvernement japonais lui rendit les plus grands honneurs à titre posthume, 10 ans plus tard.

En 2016, le château est secoué par un violent tremblement de terre dont les dégâts sont lourd, le gouvernement prévoit une campagne de restauration sur vingt ans.

Honshu

Honshu est la plus grande île du japon et aussi la plus peuplée, elle abrite 80% de la population japonaise. Autant dire que le changement d’île se voit, c’est en effet plus urbanisé. C’est dans cette partie du Japon que l’on retrouve les grandes villes et la mégalopole Tokyo.

Villes

Il est des noms qui suscitent une émotion, Hiroshima en fait partie. L’évocation de cette ville ravive des connaissances que l’on préférerait fausses. Pourtant c’est réel, une bombe atomique a bien été lâchée volontairement sur des civils, le choix de cette ville ne s’est pas fait au hasard, le nombre important d’habitants a pesé dans la balance.

On a déambulé dans cette ville, la vie a repris ses droits, mais les vestiges sont là et parlent encore, c’est un étrange sentiment que d’être ici, par une belle journée ensoleillée, naviguer d’un mémorial à un autre, à chaque fois un peu plus sonné par les informations que l’on lit, interloqués par le bal de selfies qui se déroule devant le squelette du seul bâtiment rescapé de l’explosion.

Le musée du mémorial de la paix expose des récits et des images d’archives qui témoignent sur l’intolérable, le lieu est extrêmement fréquenté. On était serrés là-dedans, l’ambiance est pesante et les témoignages glaçants. Dans une autre salle, une exposition explique le contexte politique de l’époque et comment la bombe est devenue la solution choisie par le gouvernement américain pour mettre fin au conflit. Le lâcher de bombe a permis entre autre de justifier auprès du peuple américain les dépenses énormes engagées dans le nucléaire. Cette exposition renseigne aussi sur la dangerosité du nucléaire, la pollution engendrée, les alternatives qui existent et sur les campagnes de dénucléarisation.

Le parc du ménorial de la paix qui comprend les différents lieux de mémoire, s’étend sur les bords de la rivière, c’est très agréable. Pour nous, le reste d’Hiroshima a été occulté par une histoire trop chargée malheureusement. La résilience des japonais force le respect, ils n’oublient pas, le pays n’a plus la bombe atomique, ils ont tiré des leçons du passé. On a le sentiment que ce sont les seuls.

La ville de Nara nous a procuré d’autres sentiments, on s’est senti à la fois un peu oppressé et à la fois ébahis. Nara est très, très touristique, c’est ici que l’art et le bouddhisme auraient pris leur essor, la citée possède des temples parmi les plus ancien du Japon. Beaucoup de ses monuments historiques sont classés patrimoine mondial de l’Unesco, mais les cerfs vivant en liberté dans les rues sont encore plus célèbres. C’est un spectacle assez déroutant que de voir ces jolies créatures paisibles, vagabonder aux milieux des passants, faisant fi de l’agitation que suscite leur présence. Il est possible de nourrir ces animaux en achetant des gâteries sur place spécialement faites pour eux.

On s’est contenté de découvrir le temple bouddhiste Todai-ji depuis l’extérieur, étant donné notre budget, on doit faire des choix. Ce temple est réputé pour avoir dans son enceinte la plus grande construction en bois du monde, le Daibutsu-den, ce bâtiment abrite une statue colossale de 16m représentant le Bouddha Vairocana, assis sur une fleur de lotus. L’édifice a été reconstruit suite à deux incendies, celui que l’on voit de nos jours date du XVIIIème siècle, et est un petit peu plus petit que le bâtiment originel, il comporte 8 travées de piliers au lieu de 12. Des raisons financières limitées expliqueraient ce rapetissement. La statue d’origine datait du VIIIème siècle, elle a été refaite au XIIIème siècle pareille à la précédente.


  

Un peu plus loin nous avons découvert d’autres édifices remarquables tels que le complexe du temple de Kofukuji comprenant notamment une pagode à 5 étages de 50m, elle est à l’image de l’histoire du Japon et de l’attachement des japonais à leur culture et culte, cette pagode fut détruite 5 fois et à chaque fois reconstruite. La première version date du VIIIème siècle et la dernière du XVème siècle. Cette obstination à reconstruire a quelque chose d’attachant et contribue à faire du Japon le bijou architectural qu’il est aujourd'hui.

Tokyo, agglomération la plus peuplée au monde, de quoi nous donner des sueurs froides. L’idée de se rendre dans une très grande ville, en Asie, ne nous laissait pas de marbre. De surcroît, avec notre véhicule, nous imaginions une circulation infernale. Corentin était prêt à entrer dans l’arène des boulevards de la ville et jouer des pare chocs, moi, je repensais aux villes denses et asiatiques que j’avais parcourues à pied, non sans peine. J’avais prévenu Corentin que je ne le lui lâcherais pas le bras. Nous comptions rester 4 jours dans la capitale, mais où stationner notre gros Sam ? Grâce aux réseaux sociaux, un français vivant sur place nous a recommandé un parking pas loin de chez lui avec des tarifs intéressants et proche d’une station de métro. Arrivée dans Tokyo prévue un dimanche matin, pour éviter la foule des travailleurs, et finalement le trajet fut zen ! En 1h20, nous avons traversé la ville et rejoint le parking en question. Ce bivouac urbain est un lieu très calme, proche de toutes commodités : toilettes, commerces, parc et transport. On a dormi ici, en plein Tokyo, dans le quartier de Nakano, et ce fut plus calme que certains bivouacs paumés qu’on a peu avoir ailleurs ! 

Tokyo en camion, ça roule, la conduite est très sécuritaire, pas de zèle intempestif de la part des autres usagers, circuler en ville ainsi c’est du bonheur !

  

Tokyo à pied, c’est aussi très agréable, tout se passe en douceur car tout est rodé. Les piétons marchent dans le même sens, respectent les feux, pas de bousculades, c’est calme et discipliné. C’est assez incroyable à vivre, une telle densité de population qui ne se fait pas ressentir, nous ne nous sommes pas sentis oppressés par la foule. Les transports en commun une fois que l’on a compris le principe, la logique est claire, et il y a toujours eu quelqu'un pour nous renseigner au besoin, et avec le sourire. Le matin nous laissions notre camion sur le parking, et nous avons rejoint les différents points que l’on souhaitait voir en métro. Retour à la maison en début de soirée, les pieds meurtris mais contents de nos découvertes.

Note séjour à Tokyo fut l’expérience d’un autre Japon, bien différent de celui observé jusqu'alors. Dans la capitale, sont mélangés traditions, modernité et insolite, Tokyo est intense et zen à la fois.

Nous avons voulu aller dans l’arrondissement de Shibuya et traverser le carrefour le plus fréquenté au monde, avec ses 3000 personnes environ toutes les 2 minutes. Là encore, la foule disciplinée nous a épaté. Un peu plus loin, un écrin de verdure abrite un sanctuaire shintoïste, le Meiji Jingu, une bulle de nature pleine de quiétude. En bordure du temple, nous avons déambulé dans le quartier de Harajuku et la rue Takeshita-dōri, lieu très animé et apprécié par la jeunesse pour les boutiques proposant des styles vestimentaires plus qu’originaux.

Nous avons visité d’autres quartiers avec des identités marqués comme celui de Akihabara connu pour ses boutiques spécialisées dans l’univers manga et geek. À Ikebukuro, un saut au Pokemon Center, qui reste avant tout une boutique de produits dérivés, mais aussi une étape instructive au centre d’apprentissage sur la sécurité. Cet endroit est dédié à la prévention des catastrophes. Après des explications sur les gestes à avoir en cas de tremblement de terre, nous avons expérimenté un séisme de magnitude 7 grâce à une plateforme reproduisant les secousses. C’est impressionnant, il faut vraiment être réactif pour assurer sa sécurité ! Ça nous a remis à notre place de petits humains sur la croûte terrestre ! Très intéressant et gratuit 😊

   
  

Au fil des jours on s’est aussi promené dans ce qui est devenu « notre » quartier, Nakano, très agréable à vivre, animé et calme comme on aime, le Broadway Walk offre des tas de boutiques où flâner et avec de la bouffe de rue. Lors de pérégrinations, nous avons aussi découvert la belle gare centrale de Tokyo, toute en brique, et ses bâtiments alentours avec des détails so british. Enfin, pour prendre de la hauteur nous nous sommes rendus au sommet de l’hôtel de ville, un observatoire gratuit permet d’admirer le panorama et les lumières de la ville une fois le pays du soleil levant dans l’obscurité. Tokyo, vue du ciel est une ville dense, étirée par les grattes ciels, moderne, le béton domine, les espaces verts sont chouchoutés, contre toute attente nous avons vécu ces quelques jours au sein de cette mégapole dans une ambiance paisible. 

La ville de Kyoto, ancienne capitale du pays, est toutefois considérée comme la capitale culturelle du pays, son côté très traditionnel avec ses nombreux temples a fait sa renommée. Le nombre de sites remarquables à Kyoto donne le vertige, nous sommes restés raisonnable en nous contentant d’un célèbre sanctuaire dédié à la divinité renard -Fushimi Inari-. Le lieu est extrêmement fréquenté, la longue allée de portes rouges avec 10 000 toriis est l’attrait principal. C’est en effet très beau, en revanche l’ambiance est dénaturée.

    
 

Nous étions à Kyoto lors du festival Gion matsuri, cet événement consiste en plusieurs processions de chars transportant des petits temples en bois richement décorés et accompagnés de musiciens pour répandre à l’origine la santé sur les habitants. La ville déborde alors d’animation, chaque temple érige son char, les fignolent dans la rue, des attroupements se forment tant il y a à voir sur ces constructions, ça bouchonne sur les trottoirs, des éventails sont distribués à tout va, il fait chaud et lourd, la foule est moite, les narines sont titillées par toutes les odeurs des stands de nourriture, les oreilles plus ou moins bercées par la musique des percussions de chaque char et les sifflets de la police pour gérer la circulation. Ce festival est intense pour tous les sens !  On s’éloigne de l’effervescence et on retrouve de la quiétude au bord de la rivière Kamo, lieu idéal pour se promener, lire ou discuter dans l’herbe, pour admirer les maisons aux terrasses sur pilotis et plus discrètement les japonaises en kimonos.  

Kyoto c’est aussi le temple du Pavillon d’or -Kinkaku-ji-, il s’agit d’un temple dont un bâtiment prend place au-dessus de l’eau, entouré d’un beau jardin. Cet édifice particulier, le pavillon doré, recèle des reliques de bouddha.  Il est constitué de trois niveaux, chacun ayant son propre style architectural : le style des palais de l’époque Heian, le style des maisons des samouraïs et le style des temples zen. Le nom du pavillon est dû au fait qu’il est recouvert de feuilles d’or, sur le toit prône une statue d’un phœnix chinois, le fenghuang, animal mythique dominant tous les oiseaux. Le pavillon doré est donc un édifice religieux bouddhiste, pourtant son aspect opulent ne colle pas vraiment avec les valeurs de simplicité du bouddhisme, il est dit que certains japonais boudent ce temple au profit de son voisin plus modeste, le pavillon d’argent, le Ginkaku-ji.

Le temps d’une journée nous nous sommes promenés dans le centre-ville d’Osaka avec notre amie Damla, jeune femme turque vivant au Japon que l’on a rencontré aux Philippines. Osaka est une ville moderne, dynamique, reconnue pour sa gastronomie notamment les incontournable okonomyiaki. Cette spécialité consiste en une sorte de crêpe salée épaisse comprenant différentes garnitures, au choix, coupées en petits morceaux : viande, crustacées, légumes, nouilles. L’okonomyiaki est servi avec un coulis de sauce soja et de la mayonnaise. C’est rapide, bon et économique, ça calle bien ! Osaka est aussi connue pour Dontobori qui est une rue très animée le long d’un canal, de part et d’autre les façades sont couvertes d’enseignes lumineuses, la plus connue est celle de l’homme Glico. Il s’agit d’une publicité pour une entreprise japonaise fondée à Osaka, cette entreprise produit les biscuits Mikados que l’on retrouve en France. L’enseigne représente un athlète levant les bras, c’est une attraction inhabituelle mais elle montre à quelle point cette vieille marque est présente dans la culture japonaise. 

   

Culture et patrimoine

Dans la préfecture de Ymaguchi, nous bivouaquons au pied du pont de kintai-Kyo, à l’origine bâti au XVIIème siècle, il fut détruit et reconstruit plusieurs fois, comme de nombreux monument japonais. Ce pont doit sa renommée du fait qu’il était réservé aux samouraïs et aux seigneurs. Les cinq arches sont entièrement faites en bois, elles illustrent l’ingéniosité des japonais en matière de construction en bois, sans clou ni métal !

Il reste au Japon de nombreux témoins de l’époque féodale, le château de Himeji ou château du héron blanc est le plus grand du pays et aussi un de ceux qui reste authentique, il n’a pas été reconstruit. Il est à lui seul un archétype, de nombreux traceurs de l’architecture féodale sont présents : donjon, tours, murailles, douves… Là encore pour des raisons de budget, nous n’avons pas visité l’intérieur. Ce château du XVIème s. est beau également depuis l’extérieur, malgré son imposant donjon, la superposition des toits courbes lui donne de la légèreté, il est parfaitement entretenu et restauré, le Japon chouchoute son héritage.

En terme de visites, il nous a fallu faire des choix, mais il y a une visite que l’on ne pouvait pas se refuser, c’est celle du Musée Ghibli, nous adorons les films d’animation de Hayao Myiazaki, ses longs métrages mettent en scène les forces de la nature, des divinités en tout genre et l’humain. Ce sont des œuvres poétiques et diffusant un message sur le respect de l’environnement et d’harmonie universelle. C’est assez compliqué d’obtenir des billets pour le musée, il faut s’y prendre à l’avance, mais selon nous, cela vaut le coup. Le bâtiment en lui-même est à l’image des films de Miyazaki, on déambule dans son univers, les salles d’expositions expliquent la technique utilisée pour la réalisation des films, la salle de cinéma diffuse un court métrage inédit, et partout on retrouve des éléments des films. L’immersion est totale, les grands enfants que nous sommes sont conquis ! (à noter que les photos à l'intérieur du musée son interdites, c'est pourquoi nous n'avons que peu de photos à vous proposer)

  

Le Japon surprend à bien des égards, au temple de Dainichibo repose une momie d’un moine bouddhiste. Ce moine, Shinnyokai-shonin, a suivi un processus d’auto momification faisant de lui un bouddha vivant ou sokushinbutsu.

Shinnyokai-shonin est né au XVIIIème s., dès son enfance il a été attiré par les enseignements bouddhistes, c’est naturellement qu’il est entré au monastère très jeune pour dédier sa vie à aider ses semblables. Face a la tragique famine qui toucha son pays, il décida de devenir un moine éternel pour protéger l’humanité pour toujours. Son dévouement l’amena dans un processus long et difficile. Durant 1000 jours son régime alimentaire se composa de noix et graines afin de perdre toute la graisse de son corps, les trois années suivantes il se nourrissait de racines et d'écorces et bu une décoction toxique favorisant la perte des fluides corporels. Il sacrifia également ses yeux pour remédier à une maladie des yeux touchant son village. A l’âge de 96 ans, sentant la fin de sa vie approcher, il demanda à ses disciples de l’enterrer vivant dans une boite, un bambou assurait l’arrivée d’air, au moyen d’une cloche qu’il faisait sonner Shinnyokai-shonin signifiait qu’il était toujours en vie. Il resta en position du lotus en méditant et priant en silence jusqu’à sa mort, il devint alors un moine momifié ayant atteint l’éveil. L’arrivée d’air de la boite fut obstruée, 3 ans et 3 mois plus tard, la momie du moine fut sortie de sa boite. La momie de Shinnyokai-shonin est la mieux préservée du Japon, cette auto momification fut une réussite, le moine fut alors érigé au rang de bouddha et adoré par des fidèles. Tous les 6 ans, les vêtements de la momie sont changés au cours d’une cérémonie, des morceaux de ses vêtements sont vendus comme amulettes miraculeuses pour guérir et se protéger. Fun fact, on a observer plein de belles grenouilles autour du temple 😍.

 

Le sacré est très présent au Japon, il y a deux lieux de culte que nous avons particulièrement aimé, le monastère de Koya San et l’île sanctuaire de Miyajima.

Koya San est perché à 800m sur un plateau, ce complexe bouddhiste est le résultat d’un homme, le moine Kükai. Il fonda ici un monastère, le plateau entouré de huit montagnes lui rappelait les huit pétales du lotus où siège Bouddha. Kukaï est aussi le fondateur du shingon qui consiste en une école de bouddhisme ésotérique, laquelle préconise des initiations pour atteindre le nirvana. Le Shingon fait partie des plus anciennes lignées du bouddhistes vajrayana, d’origine indienne. Kukaï fut initié lors de ses voyages notamment en Chine, de retour au Japon l’empereur l’autorisa à fonder son école.

   

Au départ, il ne s’agissait que d’un monastère qui s’est agrandi en une petite ville dédiée aux enseignements et étude du bouddhisme. Les disciples de Kukaï ont contribué au rayonnement de ses enseignements. Les pèlerins viennent en nombre ici. Nous avons particulièrement aimé Koya San pour son ambiance, il émane de ce lieu une atmosphère calme, zen, on s’est senti comme dans une bulle, de plus il n’y avait pas grand monde. En bivouaquant sur place, nous avons aussi pu nous promener de nuit, les lanternes en pierre illuminant les chemins et les moines récitant leurs prières ont accompagné nos pas.  Au-delà du superbe complexe principal de Garan et de la grande porte, le cimetière Okuno-in vaut aussi le détour, à l’ombre des majestueux cèdres du Japon on y découvre de belles sépultures et des lanternes, encore et toujours.

L’autre bulle fut Miyajima, une île sanctuaire très prisée des touristes. Nous avons fait le choix d’y aller après un temps de réflexion, il existe des bateaux pour se rendre sur l’île, la grande majorité des touristes viennent à la journée, il y a peu de logement sur l’île, par conséquent le soir, c’est calme. On ne s’est pas trompés, ça valait le coup ! On a choisi de venir sur l’île avec notre van, nous avons ainsi pu en profiter pleinement pendant quelques jours, et bivouaquer avec une vue imprenable sur le grand Tori, qui fait la renommée de l`île. Miyajima est une île sacrée shinto, il est interdit d’y naître, d’y mourir et d’abattre des arbres. Pas de cimetière, pas de maternité et une belle forêt luxuriante donc. Au programme, le torii flottant, grand portail traditionnel, le sanctuaire de Itsukushima et des animaux pas farouches, tels que des daims, des tanukis et un aigle chipeur de sandwich !

   

Le grand torii est un des highlights du Japon, c’est vrai qu’il est beau, le pieds dans l’eau, ses piliers sont chacun fait d’un seul monumental tronc d’arbre. Il en impose ! Du fait que l’île est sacrée, les visiteurs n’avaient pas le droit de fouler le sol, c’est pourquoi le sanctuaire Itsukushima est construit sur pilotis. Les visiteurs empruntaient donc un bateau à marée haute, passaient sous le torii flottant délimitant l’enceinte sacrée, puis rejoignaient le ponton du sanctuaire. Itsukushima-jinja est par conséquent suspendu au-dessus de l’eau, c’est un patrimoine très ancien du Japon, il a été fondé en 563 et reconstruit en 1168, la construction des bâtiments est en bois laqué de rouge vermillon. C’est un très beau lieu, la vue depuis les pontons sur la baie de Matsushima et le torii est très belle. En journée, c’est assez agité, cependant le soir, après le bal des bateaux pleins à craquer qui passent sous le torii, le calme revient, et l’île dévoile tout son magnétisme. 

Villages remarquables

Au hasard de nos pérégrinations nous sommes tombés sur la petite ville de Kurashiki-shi, nous nous sommes attardées plus particulièrement sur le quartier historique de Bikan. La région est connue pour la culture du coton, ce qui fait de Kurashiki un haut de l’entreprise textile, notamment le denim. Aux abords du petit canal de Bikan se mêlent échoppes, maisons traditionnelles, entrepôts réhabilités et boutiques de créateurs dans une ambiance artistique détendue, un brin chic et tendance.

  

Dans les alpes japonaises, le village traditionnel de Narai-juku est un site de préservation architectural, il permet de se plonger dans une bourgade préservée de l’ère Edo (couvrant la période du XVIIème au milieu du XIXème s.) Les auberges traditionnelles et les boutiques d’articles de bois laqués avec leurs belles devantures animent le village parfaitement entretenu et restauré par ses habitants. Le village de Shirakawa-go est également remarquable, les maisons de forme triangulaire font sa renommée. Elles sont typiquement montagnardes, les toits fortement en pente sont conçus ainsi pour supporter le poids de la neige, c’est très différent des autres villages que l’on a pu voir. Le bourg prend place dans une cuvette au milieu de sommets. Nous sommes arrivés sur place en fin d’après-midi, les commerces étaient fermés, c’était calme, en journée il peut il y avoir beaucoup d’affluence. Il y a un beau point de vue au dessus du village où il est possible de bivouaquer.

 
  

Nature

Maruyama senmaida, ou les mille rizières, offre une vue superbe sur des rizières en terrasse. Plus de mille bassins se succèdent sculptés dans la roche, l’endroit est connu des photographes, et on comprend aisément pourquoi ! En été, lors du coucher du soleil chaque rizière se fait miroir sur lequel les jeunes pousses de riz verdoyantes se dressent. Un spectacle qui nous a convaincu de rester la nuit sur place afin de profiter de cette pépite du Japon rural si traditionnel.

 

A proximité de Nagano, au Jigokudani, nous sommes allés à la rencontre des macaques japonais. Ils ont élu domicile dans les montagnes de la région du fait de la présence de sources chaudes, en effet, en hiver les primates se baignent dans les bassins. Leur épaisse fourrure est imperméable, seul l’extrémité du pelage ressort mouillée, la peau reste au sec. Lors de notre passage en été, point de neige, point de bassins fumants avec des macaques faisant trempette, mais c’était le bon moment pour observer les bébés. Ils sont d’une mignonnerie absolue avec leur frimousse dégarnie et leurs grands yeux. On est resté longtemps à observer ces petites familles, ils vivent en liberté et sont habitués à la présence humaine, ils ne s’en soucis guère d’ailleurs et tant mieux. 

  
C’est extraordinaire de les voir vivre leur vie, éduquer les plus jeunes, venir s’abreuver aux bassins, jouer, se disputer, se câliner au soleil. On a adoré cette rencontre ! 

Shikoku

La raison de notre venue sur l’île de Shikoku est la présence d’une fabrique artisanale de papier traditionnel, dit washi. Au cours d’échanges sur les réseaux sociaux, des voyageurs nous ont recommandé de faire du wwoofing chez Ayumi. Ayumi, ses parents et son frère gèrent une entreprise familiale de fabrication de washis. Le washi est très important au japon, on le retrouve aussi bien dans la vie quotidienne que dans les domaines artistiques. Il existe plusieurs types de washi, ce papier est léger et très résistant, aucun autre papier est aussi solide. Une des fibres les plus utilisées est le kozo, ou mûrier à papier, qui est un arbre provenant de l’Asie du sud-est. L’écorce de kozo est constituée de fibres très résistantes, la technique de fabrication du papier avec le kozo est née en Chine au IIIème av JC, mais au fil des siècles le procédé est exporté et apparaît au VIème siècle au Japon lors de l’expansion de la culture chinoise et du bouddhisme.

  

Nous étions donc chez Ayumi dans le cadre du wwoofing. Le wwoofing, consiste en un échange de services, c’est du travail volontaire en échange du gîte et du couvert. Nous sommes restés deux semaines chez Ayumi, ce fut pour nous l’occasion de vivre à la japonaise dans une maison typique. Étant donné les températures et l’humidité étouffantes, on n’était pas mécontents de retrouver le confort d’un logement spacieux et en dur.  Notre travail fut varié, un peu de jardinage aux abords de la maison et de la fabrique, débroussaillage du kozo, préparation des rameaux de kozo, fabrication de papier épais etc…  On a adoré ces semaines de travail, se déplacer à vélo à travers les rizières pour rejoindre la fabrique, aller se baigner dans la rivière en bas de la maison, découvrir les spécialités locales, bref nous étions dans des conditions de rêves ! Ce fut une expérience très intéressante et enrichissante, aussi bien au niveau des connaissances acquises qu’au niveau humain. La famille Hamada nous a simplement touché.

La ville la plus proche était la petite ville de Kochi, Ayumi et moi-même nous sommes rendus dans un onsen. Les onsens sont des bains publics, c’est très populaire au Japon. Les onsens sont pour la plupart non-mixtes, chacun vient dans le plus simple appareil, les tatouages y sont interdits car toujours très connotés Yakusa, la mafia japonaise. En effet, les Yakusas se réunissaient dans les onsens pour discuter affaires. Afin de couper court à ces rdv, les tatouages, signe distinctifs des mafieux, ont été interdits.

L’expérience du wwoofing fut aussi l’occasion de découvrir d’autres traditions nippones, telle que le port du kimono. La maman de notre hôte tenait par le passé une boutique de kimonos. Lors d’un festival célébrant l’été, Ayumi m’a habillé d’un kimono authentique. Quel honneur ! Revêtir un tel vêtement, c’est très technique, heureusement les tutos youtube et les conseils de la maman nous ont bien aidé. Marcher et s’asseoir avec un kimono, c’est aussi un peu technique !

  

Nos hôtes nous ont recommandé d’aller du côté de la vallée de Yasui. Une rivière à l’eau turquoise coule en contrebas d’une petite route qui serpente, nous avons bivouaqué là-bas, la rivière est en plus propice à la baignade, un régal par de telles températures !

L’île de Shikoku est très nature, avec un quotidien très rural, on a le sentiment que la simplicité qu’apporte l’île suffit amplement à ses habitants. 

La vie en van

Pour circuler au Japon avec son propre véhicule étranger, il faut se soumettre à un peu de paperasse. Tout d’abord, le CPD -Carnet de Passage en Douane- est fortement conseillé mais non obligatoire. Toutes les compagnies de ferrys ne sont pas à l’aise avec la procédure de régularisation d’un véhicule étranger. Le CPD facilite alors les démarches.

Ensuite, il faut assurer son véhicule, dans notre cas c’est auprès de la compagnie de ferry que cette démarche a été faite.

Et enfin pour rouler, il est nécessaire de faire traduire en japonais son permis de conduire, pour cela il faut contacter la JAF : Japan Automobile Federation. Les douanes ne vous laisseront pas conduire sans un permis traduit en japonais. Pour se faire il faut se rendre au bureau de la JAF, en transport en commun ou en taxi, avec les documents du véhicule. Nous avons obtenu le permis traduit en 1h. Ensuite il faut retourner aux douanes avec ce sésame et finaliser la régularisation du véhicule.

En dehors de l’administratif qui peut sembler contraignant, rouler au Japon c’est facile ! Le trafic est fluide, même à Tokyo (!) et la conduite des usagers de la route est ultra sécuritaire, il ne faut pas oublier de prévoir un temps d’adaptation, car ça roule à gauche ! Le réseau routier en très bon état, toutefois les places de stationnement sont petites, avec notre 5m40 on avait parfois l’impression d’avoir un engin démesuré par rapport aux petites voitures des locaux. Globalement on ne roule pas vite, en ville les limitations sont respectées, il y a beaucoup de ralentisseurs et en dehors des villes les routes sont vite étroites et sinueuses. Pour circuler rapidement, il y a les autoroutes, toutefois elles coûtent chères, lors de notre passage le tarif était d’environ 0,20€/km auquel s’ajoute les frais d’entrée.

Pour ce qui est de l’entretien du véhicule, il faut d’abord trouver le garage qui connait la marque du véhicule et qui parle un minimum anglais. Comme pour beaucoup de choses au Japon, le travail effectué sur notre véhicule fut hyper soigné. On laisserait notre camion les yeux fermés dans un garage japonais.

   

Niveau pratique

  • Notre hébergement : Nous avons dormi dans le van, à l’exception de deux semaines chez l’habitant pendant notre wwoofing. On a privilégié les bivouacs en bord de plage, et parfois des stationnements de lieux touristiques ou de départ de promenades
  • Téléphone et internet : Nous obtenions le réseau téléphonique et internet avec une carte sim locale. Le tarif est assez cher mais il y a un bon débit. Nous avons opté pour l'opérateur KT Mobile. Grâce à l’agence Vivre le Japon, nous avons bénéficié du Pocket Wifi, cela nous a permis d’obtenir internet gratuit et illimité dans les villes et abords.
  • Argent : Nous effectuions des paiements en cash et des retraits dans les distributeurs de billets des kombinis, tout particulièrement dans les kombinis 7/11 car il n’y a pas de frais de retrait. Depuis le début de notre voyage, dans tous les pays traversés nous utilisons des cartes de débits nous permettant de ne pas avoir de frais lors des retraits (voir notre article à ce sujet).
  • Transports : La plupart de nos déplacements se sont fait avec notre van. Il n’y a qu’à Tokyo, où nous avons emprunté les transports en commun, autrement, nous marchons. 😊
  • Langue : Sans surprise, le japonais ! L’anglais est un peu présent dans les lieux touristiques mais quasi inexistant dans les zones moins fréquentées. L’application Google traduction fut bien utile ^^’
  • Nourriture : Si l’on va jusqu’au bout de la découverte en adoptant les habitudes alimentaires locales, le budget alimentation est vraiment abordable. Nous nous sommes laissé tenter par la nourriture bon marché, rapide et typique, telle que les onigiris -boule de riz collant garnis et enrobés d’une feuille d’algue norii-, les nouilles yakisoba et les inari sushis. Nous faisions très régulièrement une halte dans les kombinis pour acheter de quoi manger sur le pouce. Pour cuisiner, nous faisions les courses aux marchés, ou sur les étals le long des routes ou dans les supermarchés (Gyomu Super pour des petits prix). Les fruits et légumes importés sont chers, les produits locaux sont très abordables pour la plupart.
  • Sécurité : Le Japon est un pays hyper sécuritaire, en revanche les forces de la nature sont très présentes, on vous recommande de télécharger les applications d’alertes des catastrophes naturelles. Durant les 3 mois au Japon, nous avons ressenti des tremblements de terre, traversé un typhon, entendu des sirènes de relâche de barrage et reçu des alertes aux tsunamis. Partout aux bords des rivières et des plages à proximité d’habitation, il y a des hauts parleurs qui servent a diffuser des messages d’alertes, toujours en japonais. Dans le doute, à moins de comprendre le japonais, si un message est diffusé, il vaut mieux quitter les lieux.

Bons plans

  • Les kombinis !! Ces petites épiceries multi-services facilitent grandement le quotidien ! On y trouve de tout, produits du quotidien, alimentation, plats à emporter, distributeurs de billets, photocopieuses, toilettes, poubelles, journaux, on peut aussi venir y récupérer des colis amazon. Il y en a partout et leur côté pratique manquent aux japonais vivant à l’étranger.
  • Les michinoeki, ce sont des aires de repos le long des axes routiers, ces aires sont multi services, on trouve de quoi se restaurer, des produits locaux, des informations touristiques, des toilettes et des poubelles (Difficile à trouver par ailleurs) et parfois des emplacements de camping. Il est possible de télécharger sur internet une carte recensant les michinoeki. 

Nos coups de cœur

Bivouacs

  • A Miyajima, avec la vue sur le torii flottant
  • Sur la plage sauvage de Hioko sur l’île de Kyushu
  • Au point de vue sur les rizières des milles terrasses Maruyama senmaida
  • Comme spot urbain : le bivouac à Tokyo dans le quartier de Nakano. 
(Nous les avons ajoutés dans l'application IOverlander).

Lieux visités

  • L’île sanctuaire shinto de Miyajima
  • La ville monastique bouddhiste de Koya San
  • Le temple de Fushimi inari à Kyoto.
  • Tokyo et les quartiers de Shibuya, Akihabara, Nakano pour une plongée dans le Japon moderne et hyper connecté. 

Activités

  • La visite du musée des studios Ghibli
  • Aller admirer les singes à Jigokudani vers Nakano
  • Voir les enfers de Beppu.

Nourriture

Avec entres autres les nouilles yakisoba, ramen, inari sushis, onigiris et mochi, on s’est régalés ! En tant que végétariens, on a trouvé notre bonheur.

  
  

Pour conclure

Le Japon est définitivement un pays zen, dans sa culture mais aussi dans sa façon d’être. Ce fut pour nous un plaisir de découvrir cette ambiance si particulière, sur laquelle il est difficile de mettre des mots, mais qui se ressent tellement. On a eu l’impression que tout est fait et pensé pour agir dans le respect et de façon ordonné, sans que cela soit une contrainte, mais au contraire une volonté naturelle.  

Nous avons ressenti au Japon une rigidité souple délicieuse, découvert les japonais, des personnes délicates souriant du fond des yeux. La nature luxuriante de l’archipel n’a cessé de nous émerveiller par son omniprésence et sa majestuosité, nous comprenons mieux désormais d’où vient l’inspiration des films de Miyazaki.

La gastronomie japonaise est raffinée, multiple et authentique, les plats sont sains et savoureux, le rapport à la nourriture et à la consommation est différent, les japonais aiment la fraicheur des produits, ils vont faire des courses très régulièrement plutôt que de stocker. Une fois de plus, dans ce pays, on réalise que le dessert, c’est définitivement très français !

C’est ici que l’on a le plus craqué sur l’achat de souvenirs, notamment des tissus, la tradition du textile au Japon est ancestrale, on a rapporté plusieurs étoffes, l’avantage c’est que c’est local, léger, incassable, biodégradable, et utilisable pour différents usages, en déco ou en couture.

Nous nous sommes aussi attelés à remplir un carnet de pèlerin, dit goshuin-cho, il s’agit d’un petit livre aux pages vierges dans lequel on fait apposer une estampe – shuin- propre à chaque temple. Ce sceau est payant, c’est comme un don fait au temple, le tampon est unique à chaque lieu et permet de garder une trace du passage dans les temples bouddhistes et shinto. Le shuin est fait par un moine bouddhiste ou un kannushi -personne responsable de maintenance dans les lieux sacrés shinto- en apposant un large tampon auquel il ajoute autour des calligraphies comprenant le nom du temple, le jour de la visite et parfois un adage.

On peut aussi utiliser ce carnet de façon non sacrée, on peut y tamponner soit même les tampons mis à dispositions dans les lieux touristiques. Cependant, attention, il est mal vu de mélanger dans un même carnet les estampes sacrées et les tampons profanes, les remarques ne seront jamais directes, mais les japonais ne comprendront pas un tel mélange et ce sera perçu comme un manque de respect. Nous avions acheté deux carnets goshuin-cho, un pour les temples et un pour les lieux non sacrés, en plus ces carnets sont très jolis par eux même, cela nous fait de jolis souvenirs originaux et porteur de sens.

  

Traditionnellement pour signer un document, les japonais utilisent un tampon personnalisé comprenant les initiales du détenteur. Les documents officiels peuvent être signé ainsi, il est possible de s’en faire faire un dans les boutiques dédiées que l’on trouve en ville, ainsi on peut signer les documents à la japonaise, cette coutume est aussi valable en Corée du Sud.

True fact vérifié, les origamis sont effectivement partout au Japon, il n’est pas rare de trouver sur les tables des restaurants des tickets plié en origamis par les clients.

Le Japon c’est aussi d’étranges machines installées sur des parkings à la campagne, ces installations nous ont interloqué un bon moment jusqu'à ce que l’on nous apprenne qu’il s’agit de machine à laver les grains de riz. Ça y est, le lien se fait enfin dans nos têtes ! En zone rurale, la plupart des maisons ont quelques rangs de riz dans leur jardin, ce riz avant de le consommer, il doit être lavé. Tout s’explique !

La culture du thé et sa consommation est aussi tout un rituel, nous en avions aperçu des bribes en Corée du Sud, la quantité de thé et de services à thé disponibles dans les magasins montrent l’importance de ce breuvage au Japon. De quoi nous donner des complexes avec nos habituels sachet de thés et bouilloire !

Le Japon est résolument un pays riche de contrastes, le visiteur va de surprise en surprise, impossible pour nous de se lasser, les beautés monumentales comme les petits détails attirent l’intérêt, intrigue ou amuse au quotidien. On aimerait découvrir encore plus du Japon, 3 mois de pérégrinations ce fut définitivement trop court à notre goût, un jour on retournera au pays du soleil levant.

Goshuin-Cho


Notre vidéo du Japon

Commentaires

  1. époustouflant votre périple !!! ç sa donne envie d'y aller.

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  2. Bonjour à tous les 2, je viens de vous découvrir grâce à RTL et c'est un vrai bonheur. Le seul petit
    point commun que nous avons, c'est que nous avions nous aussi un "SAM" avec lequel nous avons beaucoup voyagé, super marque, super "camion", comme nous l'appelions. Mon mari étant parti pour d'autres cieux, je me suis séparée de ce "camion" qui était notre compagnon de vacances, je vais donc vous suivre avec un très grand plaisir et une grande admiration.
    Prenez soin de vous et de Sam, qui est le compagnon parfait pour ce très beau périple, qui je l'espère va reprendre très vite pour vous
    RENEE

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